Du 18 septembre 2020 au 30 juin 2021 dans les espaces publics des Archives nationales, 59 rue Guynemer - 93380 Pierrefitte-sur-Seine 

Que devient la bande dessinĂ©e lorsqu’elle s’échappe des livres et des Ă©crans ? Lorsqu’elle s’émancipe des outils de lecture individuelle qui dĂ©terminent son Ă©criture ? 

Nous expĂ©rimentons une crĂ©ation narrative qui fait appel aux codes de la bande dessinĂ©e et mobilise les compĂ©tences et habitudes de lecture de bande dessinĂ©e que possĂšde chaque visiteur tout en se dĂ©ployant hors des livres : nous Ă©crivons une bande dessinĂ©e qui s’inscrit dans un espace habitĂ© par les corps des lecteurs ; des rĂ©cits dont l’écriture autant que la lecture sont Ă©troitement dĂ©terminĂ©s par la topographie, les caractĂ©ristiques physiques et la nature du lieu ; des rĂ©cits qui se dĂ©ploient sur les murs, les sols, les plafonds, voire dans les meubles ou en volume, tout en restant indubitablement des rĂ©cits de bande dessinĂ©e, fondĂ©s sur la sĂ©quentialitĂ© des images. 

Chaque dispositif imaginĂ© Ă  cette fin est donc pensĂ©, non comme un simple gadget visuel ou comme une fantaisie de scĂ©nographe, mais comme un vĂ©ritable gain narratif pour le rĂ©cit de bande dessinĂ©e qu’il porte, et sans lequel ce dernier ne ferait pas sens. 

Ainsi s’ajoutent Ă  la palette de l’écriture de la bande dessinĂ©e de nouveaux Ă©lĂ©ments de grammaire : l’espacement entre les cases, leurs hauteurs, leurs tailles, leurs emplacements, qui appellent des postures, des tempos et des modalitĂ©s de lectures impliquant le corps du lecteur autant que ses seuls yeux.

En sortant la bande dessinĂ©e du livre, en utilisant comme support les murs, les vitres, les meubles, nous nous posons un dĂ©fi : Ă©crire et conduire un rĂ©cit mobilisant des compĂ©tences de lecture de bande dessinĂ©e hors de l’environnement dans lequel elles se dĂ©ploient habituellement, un rĂ©cit qui se parcourt non seulement avec les yeux mais avec le corps entier. Il s’agit donc d’inventer une nouvelle expĂ©rience de lecture de bande dessinĂ©e. 

Nous choisissons, en revanche, de conserver une trame narrative fictionnelle classique comme structure de cette expĂ©rience. Nous forgeons cette fiction Ă  partir des impressions et des Ă©motions que nous avons ressenti lors de notre rencontre avec les Archives Nationales, avec ses agents, avec ses usagers, avec le bĂątiment, et avec les archives elles-mĂȘmes. 

Nous avons ainsi Ă©tĂ© frappĂ©s par la contradiction apparente entre la publicitĂ©Ì des archives et leur conservation dans un gigantesque coffre-fort : les archives sont soustraites au regard et divulguĂ©es par fragments, sous surveillance... Quand on veut Ă©crire une histoire, comment ne pas imaginer que ce dispositif (qui rĂ©pond Ă©videmment Ă  des enjeux de conservation) n’a pas plutĂŽt pour but de cacher des mystĂšres ou des connaissances fantastiques ? Et ceux qui organisent et opĂšrent cette grande machine n’ont-ils pas un agenda cachĂ© et de mystĂ©rieux objectifs ? 

Nous avons bien Ă©videmment exploitĂ© ce moteur de fiction. Il y en a bien d’autres : par exemple le surgissement du passĂ© que provoque l’archive par sa matĂ©rialitĂ©Ì (un papier rĂ©el, une encre rĂ©elle...), l’actualisation du passĂ© dans le prĂ©sent, et l’émotion que cela provoque ; ou encore le fait que l’archive ne porte pas une vĂ©ritĂ©Ì brute, mais est un ingrĂ©dient de l’Histoire auquel le point de vue du lecteur donne un sens ; et bien sĂ»r, la responsabilitĂ©Ì qui incombe Ă  l’archiviste, l’éthique ou les croyances qui la fondent et l’esprit de mission qui habite les personnels des Archives nationales ... 

Nous sommes partis de ces amorces trĂšs subjectives, moteurs de fiction, et les avons nourris de quelques fantasmes ; le rĂ©cit nous a conduit assez loin du rĂ©el... 

Le lecteur est ainsi invitĂ© Ă  suivre trois rĂ©cits croisĂ©s Ă  partir d’un Ă©vĂšnement originel commun : Une archive a disparu ! 

  • À la demande de l’archiviste Prunille dont la responsabilitĂ©Ì est engagĂ©e, un duo d’enquĂȘteurs intervient. En mettant Ă  jour le passĂ© de l’archive disparue, l’enquĂȘte de Claire et Armand mĂȘle les Ă©vĂšnements fantastiques, le rapport Ă  l’Histoire et le terrain plus intime de l’émotion et du sentiment amoureux. 

  • Un autre enquĂȘteur a Ă©tĂ© dĂ©signĂ©Ì plus officiellement par l’institution : l’inspecteur gĂ©nĂ©ral des archives, du haut de sa longue expĂ©rience, se fait fort de percer le mystĂšre et de designer un coupable. C’est compter sans les nombreuses avanies qui vont entraver sa marche glorieuse. 

  • À cotĂ© de ces deux enquĂȘtes, un groupe d’archivistes semble en Ă©bullition. Une mystĂ©rieuse confrĂ©rie chargĂ©e de protĂ©ger une non moins mystĂ©rieuse archive maudite s’inquiĂšte sĂ©rieusement de la lumiĂšre que les investigations pourraient porter sur leurs activitĂ©s secrĂštes. 

Dans leurs contenus comme dans leurs formes, ces rĂ©cits font appel Ă  des diverses traditions de la bande dessinĂ©e : l’aventure, le gag, la romance, le fantastique... 

Leur intrication et leurs rapports reflĂštent la topographie gĂ©nĂ©rale du site dans lequel elles sont implantĂ©es : un rĂ©cit central, coffre empli de mystĂšres, auquel s’attachent des rĂ©cits satellites, multiples et ouverts. 

Sarah, Olivier, Pilau et Audrey 

CrĂ©ation : 

Sarah Ayadi, Olivier CrĂ©pin, Pilau Daures, Audrey Hess 

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Commissariat et scĂ©nographie : 

Olivier CrĂ©pin et Pilau Daures, 

avec l’aide de Sarah Ayadi, Kassandra David, Camille Cimper et Rose CrĂ©pin

 

Remerciements : 

Anne Rousseau
et tous les agents des Archives Nationales

   

Impressions : 

Archives Nationales Vision DĂ©cor 

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Photographies : 

Caroline Guiraud

Une exposition produite par AlbertoProd et Les Archives Nationales dans la programmation du festival Formula Bula

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