La bande dessinée est affaire de personnages, sa première force réside dans son pouvoir d’incarnation. La bande dessinée donne à voir un caractère, un parcours de vie, une personnalité, dans un environnement ou dans une « aventure » qui révèle le personnage.
Curieusement, les personnages de bande dessinée s’incarnent souvent dans des corps de papier peu conventionnels : à bien y regarder, Astérix et Obélix sont difformes et la couleur des schtroumpfs est extraordinaire ; on peut continuer cette liste avec la minceur pathologique de Lucky Luke, les animaux anthropomorphes de Jason ou de Maus, les pieds immenses, les grands mentons, les gros nez…
De façon encore plus étrange, ce que, dans le monde réel, nous appellerions, dans un euphémisme adoucissant, les « différences » de ces corps de papier, échappent à la différence : tout est fait que nous, lecteurs, acceptions que ces personnages sont « nous ». Le lecteur est ainsi habitué à comprendre les corps difformes des personnages de bande dessinée comme des individuations, de simples variations autour de la normalité plutôt que comme des anormalités. L’apparence de Son Goku ne provoque pas le sentiment d’étrangeté que nous ressentirions si nous le croisions dans la vie réelle
Il faut donc d’autres indices pour signaler au lecteur la véritable « différence » d’un personnage, celle qui serait vécue comme telle dans le monde réel. C’est souvent le regard porté par un ou plusieurs personnages du récit qui révèle cette différence au lecteur ; dans les bandes dessinées mettant en scène des corps malades ou handicapés, on retrouve donc ce que la vie nous apprend : c’est le regard qui fait la différence.
Une exposition produite par le réseau 3RBD
Commissariat et scénographie : Pierre-Laurent Daures pour AlbertoProd
Contact : pilau@pilau.fr
Illustrations : Tiphaine Gantheil
Merci aux auteurs et autrices :
Diego Agrimbau, Arno, François Ayroles, Mirranda Burton, Héloïse Chochois, Cil Vert, Craoman, Dav Guedin, David B., Aurélien Ducoudray, Maria et Miguel Gallardo, Arnaud Gautelier, Dante Ginevra, Emilie Gleason, Bernard Grandjean, Jodorowski, Joseph Lambert, Renaud Pennelle, Delphine Priet-Mahéo, Roger et Zidrou
Merci à Frédéric Chauvaud, Julien Gaillard et François Debien de l’Université de Poitiers